clichés invisibles
sur le pas d’une porte (encadré de noir)
un enfant, plus indien que métis
âgé de douze ans et trois mois
surveillle la rue et les caisses en épis de mandarines à vendre
(deux kilos, 0,99 pesos)
un homme d’affaire au teint de céramique
yeux fermés au moment du cliché
traverse la rue Bolivar d’un pas de libertadore
le visage précédé d’un spectre Lucky Strike
premier plan : un métis à moustache se pince l’entresourcil
plié en deux sur un journal, table en plastique jaune, arbre tropical
derrière : passerelle enjambant une voie rapide, rangée de figurants
agitant le drapeau rouge à l’étoile du PT du candidat-président
un maxigolf, avec des villas blanches et roses en guise de trous
bas côté de la route
une explosion de feuilles, d’herbettes
découpées de mille ombres et ombricules
et une giclée de microfleurs, rouge comme du sang de film d’horreur
des montagnes couvertes de palmiers
des sucres d’orges en béton armé
des têtes de Père Noël à moitié peintes
une crèche géante inachevée
en blanc sur le muret : Parque Albanoel